L’automne s’impose de plus en plus. Les couleurs des arbres changent.
L’odeur ambiante se modifie. On peut sentir la végétation qui s’assèche par
manque de sève. Même si le soleil reste encore présent, la température diminue
progressivement. Quant à nous, les humains, nous ajoutons des épaisseurs de
vêtements lorsque nous sortons.
Cette période de l’année est propice à des sorties en nature afin
d’apprécier ces changements immuables qui reviennent chaque année. Nous devons
nous préparer pour la saison froide qui approche. Nous ne sommes pas les seuls.
Les animaux doivent eux aussi penser à l’hiver et à leur survie.
Prenons le cas des outardes. Après avoir niché et élevé leurs petits
dans nos régions, le mois d’octobre signifie pour eux le prochain départ vers
une migration plus au sud. Au détour d’une promenade, j’ai pu assister à un
rassemblement d’outardes en préparation pour le grand voyage.
Grand conciliabule |
Voici ce qui
aurait pu se dire…
— Bon, on écoute, les plus jeunes!! Si nous sommes rassemblés ici c’est
sérieux. Les femelles, ramenez vos oisillons au sérieux.
— Pour quoi faire? demandent les plus jeunes. L’eau est fraîche et nous
voulons encore jouer.
— Vous ferez cela plus tard, nous devons nous organiser et vous faire
pratiquer.
— Pratiquer quoi?
— Y a-t-il juste moi qui ai enseigné à mes petits ce qui les attend
d’ici quelques semaines?
— Calme-toi, grand-sage. Nous étions comme eux il y a quelques années,
tu ne te rappelles pas?
— Oui, je me souviens, justement. J’ai perdu mon frère, car il riait
des adultes et il n’était pas préparé. Il était trop faible pour nous suivre et
nous avons été obligés de l’abandonner. J’ai même vu un renard sauter sur lui
aussitôt qu’il a touché le sol. Alors oui je me souviens et je ne veux pas
qu’il arrive la même chose cette année.
Le calme est revenu dans la colonie et en cœur les parents
annoncent :
— OK les enfants, on écoute. Après les exercices, vous pourrez
reprendre vos jeux.
Le grand-sage satisfait reprend la parole.
— Excellent. Comme vous le savez tous ou presque, nous allons bientôt
devoir quitter notre coin et voler de longues journées jusqu’à notre point de
migration hivernale. Cela ne se fait pas à la légère et nous devons tous être
prêts afin de ne pas retarder le groupe. Pour les plus jeunes, qui ne sait pas
voler en formation en V?
— Moi, moi, moi aussi… piaillent en cœur bon nombre d’oisillons de
l’année.
— Alors il est temps d’apprendre. Nous avons plusieurs levers de soleil
pour mettre en place des formations parfaites et arriver tous sains et saufs.
Les parents expliquez leur la méthode. Les plus anciens formons des groupes et
organisons nos formations. Après viendra le temps des pratiques. Quand sera
vraiment venu l'heure de partir, ceux qui ne seront pas prêts seront livrés à
eux-mêmes afin de ne pas risquer la sécurité de toute la colonie.
Alors que tous s’organisent, on les entend clairement cancaner,
certains plus fort que d’autres. Chacun voulant s’octroyer le rôle de leader de
la formation, le grand-sage devra choisir lui-même ceux qui possèdent les
capacités nécessaires à ce rôle.
En après-midi, c’est le temps de la première pratique. Les voilà qui
quittent leur plan d’eau chaque formation l’une après l’autre. Le grand-sage
qui supervise en avant du premier et du plus gros groupe lance ses
recommandations.
— Essayez de bien former le V et écoutez votre responsable. N’essayez
pas de dépasser votre voisin, votre tour viendra de vous épuiser pour la
colonie avant de retourner en arrière.
Le cancanage va bon train chez les plus jeunes. Les responsables ont de
la difficulté à mettre de l’ordre. Chacun essaie de trouver la place qui sera
la sienne et qu’il devra garder tout au long du voyage. Les premiers envols
ressemblent plus à une cacophonie qu’à une organisation bien structurée.
Au fur et à mesure des pratiques, on distingue une mise en place de
plus en plus organisée.
On essaie de se placer |
En pleine concentration |
Presque une ligne parfaite |
Un beau V |
Encore quelques jours avant le grand départ. Pour nous, les humains,
ces moments sont un vrai ravissement. Ces outardes vont nous manquer durant les
longs mois d’hiver avant leur retour au printemps, prêts à agrandir la
colonie.
Bon vol, chères outardes. Prenez soin de vous toutes et revenez-nous
aussi nombreuses, car vous nous annoncez le printemps et le retour de la
chaleur.
Bonne semaine à toutes et à tous.
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