La tête dans les vagues

Assise à ma table, face à la mer, où le vent souffle les embruns suivant le courant, je trouve l'inspiration qui me permet, au fil des mots, de vous partager mes passions.

lundi 14 septembre 2015

Pourquoi visiter les Îles?

Pourquoi choisit-on d’aller visiter les Îles de la Madeleine? C’est une question que plusieurs se posent et que beaucoup m’ont posée personnellement.
Petite histoire d’un voyage d’exploration inattendu.
Voici les thèmes abordés cette semaine.

* * *

POURQUOI ALLER AUX ÎLES DE LA MADELEINE?

Pour refaire le voyage des grands navigateurs sur le fleuve.
Pour revisiter un Québec à l’image de mes racines françaises.
Pour admirer une nature grandiose, majestueuse, imposante.
Pour connaître le vertige de la mer toujours présente autour de moi.
Pour observer à l’horizon le mélange de la terre, de la mer et du ciel.
Pour saluer les couchers de soleil sur la baie de la Belle Anse.

Pour me mêler à des gens différents.
Pour ramener des histoires, des accents, des odeurs et des saveurs sur le bout de la langue.
Pour côtoyer une société encore authentique.
Pour partager une vie de labeur et d’efforts avec les pêcheurs, levés tôt, couchés tard.
Pour apprécier le poisson frais.
Pour participer à la survie économique d’une région éloignée.
Pour découvrir les mille trouvailles des artistes créatifs.
Pour me sentir proche de cette population émouvante, sensible et vivante..
Pour mesurer le temps autrement.
Pour comprendre que chaque grain de sable est unique.
Pour revenir changée.
Pour aimer un peu mieux ma vie avant, pendant, et après le voyage aux Îles.
Pour me faire de beaux souvenirs.

Jocelyne

Voyage d’un cormoran.

Depuis aussi loin que je me souvienne, je vole au-dessus de la mer, celle qui entoure ces îles perdues en plein cœur d’un golfe. Une vie humaine grouille durant le temps chaud. Sur l’eau, de drôles de machines flottantes se déplacent parfois en des lieux très proches, parfois plus loin. D’autres disparaissent à l’horizon peu après le lever du soleil après avoir avalé quantité d’humains, mais réapparaissent avant son coucher vomissant d’autres humains.

Quant à moi, je survole ces îles et cette mer qui les entoure à la recherche de nourriture. Bien sûr, je ne suis pas seul. D’autres oiseaux, blancs quant à eux, font comme moi et se nourrissent de poissons. Seulement, je suis différent. Je suis obligé de me faire sécher les plumes, contrairement aux autres qui possèdent un plumage imperméable.

Je suis fait comme cela, ce n’est pas grave, mais ce qui me déplaît ce sont les rires moqueurs des humains qui n’hésitent pas à me regarder à travers d’une petite boîte carrée qu’ils placent devant leur visage. « Ils me prennent en photo » comme ils disent.

Je me suis demandé s’il n’y aurait pas un endroit où je pourrais vivre loin de cette eau qui recouvre mes plumes et où je pourrais me nourrir facilement. Après y avoir réfléchi, le seul moyen de le savoir est de me servir d’une des machines roulantes qui sillonnent les îles. Je n’ai qu’à profiter de ce que l’une d’elles est accessible et je m’installe dedans avant qu’elle ne se fasse avaler par la grosse machine flottante. Voilà des mois que j’observe et je ne crains pas de me faire avaler, car ces humains y vont de leur plein gré. Il me suffit d’être à l’affût et de choisir le bon moment et la bonne machine.

Le soleil vient de se lever, je suis en position sur le bord de la mer. Je suis à la recherche de la machine qui va me servir de transport. Tiens! En voilà une qui fait bien mon affaire. Elle est assez volumineuse, même s’il ne reste pas beaucoup de place à l’intérieur. Après tout, je ne suis pas très gros. J’attends que la grande bouche soit ouverte et je m’installe confortablement, bien caché, juste à temps avant qu’elle se referme.

Le temps d’attente fut assez long que j’ai eu le temps de dormir un peu. Je suis réveillé par le mouvement de la machine qui roule. Je n’ose bouger pour ne pas être repéré et j’attends tout en essayant d’interpréter les sons. J’avoue que parfois la peur m’envahit lorsque j’entends des bruits tellement forts. Je me rassure en pensant à la nouvelle vie qui m’attend.
Même si la faim me tenaille un peu durant ce voyage que je trouve interminable, je vis, malgré tout, une expérience incroyable. Enfin, la machine s’arrête pour de bon. Je le sais, car les humains ont commencé à enlever les objets qui m’entourent. Heureusement, ils ne m’ont pas encore vu et je dois profiter de leur courte absence pour m’échapper et découvrir mon nouveau milieu de vie.

Je survole cet endroit bien différent de ce que je connais. Il n’y a pas beaucoup d’arbres ou d’herbes, il n’y a que des lignes grises ou noires entre des blocs gris ou rouges, certains beaucoup plus gros que d’autres. Une foule d’humains marchent en se bousculant, la tête penchée sur une petite boîte qu’ils tiennent entre leurs mains, sans se regarder. Je les observe d’en haut et ils me donnent le tournis tellement ils semblent stressés.

Je continue ma découverte. En bas, ce ne sont pas des humains qui fourmillent, mais des machines roulantes. Les unes collées aux autres elles avancent en se faufilant à droite et à gauche. Ces machines sont encore pires que les humains se déplaçant sur ces lignes grises.

Mais qu’est ce que cet endroit a pour attirer autant d’humains qui ne paraissent pas heureux du tout d’être là?

Je commence à regretter mon départ. Je me trouve plus chanceux de vivre au bord de cette mer. C’est moi qui dois rire de ces humains. Ils ont l’air pas mal plus ridicule que moi avec mes ailes ouvertes pour faire sécher mes plumes. Je ne peux rester ici, autrement je ne donne pas cher de ma peau. Voilà plusieurs levers de soleil que je vis et j’ai de la difficulté à me trouver de la nourriture. Je commence à faiblir. Je dois trouver le moyen de revenir d’où je viens. Je retourne voir les humains qui m’ont amené. Peut-être repartent-ils chez moi. Il me semble que je les voyais souvent.

Ah tiens les voilà! Ils s’installent à nouveau dans leur machine roulante avec certains objets qu’ils avaient la première fois. Après tout, je n’ai rien à perdre, je tente le tout pour le tout. Je m’installe presque à la même place tout en espérant me réveiller sur le bord de la mer que je n’aurai jamais dû quitter.

Après un long voyage, je suis réveillé par le bruit de la bouche de la machine flottante qui s’ouvre. Je me sens bouger et me tiens prêt à sortir dès que je le pourrais. Sans en être encore sûr, j’ai le sentiment d’être revenu à mon nid, les sons me sont familiers. Jamais plus je ne quitterai ce coin où je suis né, je veux y mourir. De plus, les humains pourront toujours rire de moi, ce n’est rien. Moi je sais comment ils vivent et je ne les envie pas. Si je peux les faire rire un peu, alors tant mieux, je vais continuer à me faire sécher les ailes.

Dominique   

Je remercie Jocelyne pour l’envoi de son texte.

Bonne semaine à toutes et à tous.

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