La tête dans les vagues

Assise à ma table, face à la mer, où le vent souffle les embruns suivant le courant, je trouve l'inspiration qui me permet, au fil des mots, de vous partager mes passions.

dimanche 14 décembre 2014

L’arbre préféré des enfants.

Le temps des fêtes approche et c’est le moment pour moi de vous offrir mon conte de Noël. Voici un symbole de cette période qui a toute son importance et qui apporte une belle magie qu’on ne veut pas perdre.


L’arbre préféré des enfants.

Dans une forêt du Nord-du-Québec, une famille de sapin attend la sortie de terre du dernier de la famille. Le soleil chauffe leurs aiguilles, la neige a pratiquement disparu sauf à quelques endroits à l’abri des rayons chauds au pied des aînés de cette forêt. Le printemps est bien installé et ici et là chacun surveille le sol. Quelques branches menues poussent la terre et sortent enfin du sol. Comme il semble fragile! Les plus âgés vont le protéger jusqu’à ce qu’il puisse se défendre contre les grands vents et le froid du prochain hiver. L’été succède à cette naissance apportant tous les nutriments dont il va avoir besoin pour se fortifier.
Le voilà qui a déjà pris quelques centimètres. Petit à petit, les journées raccourcissent, les températures baissent. Les plus grands protègent les plus petits avec leur gros tronc et leurs branches plus fournies. Les premières neiges recouvrent le sol. Les petits nouveaux ne sont pas assez hauts pour garder leur cime en dehors. Avant qu’ils ne disparaissent complètement, les plus vieux les rassurent, leur disant que tout est normal, que c’est le cycle des saisons.

Avant que le froid ne soit bien installé, des humains se promènent dans la forêt avec des outils bruyants. Certains sont prudents et font attention aux nouvelles pousses, par contre d’autres ne regardent pas où ils mettent leurs pieds et c’est ainsi que des bébés sapins se font piétiner avant d’avoir pu grandir assez pour être vu. Ces gens sont à la recherche de sapins ni trop petits ni trop grands, des spécimens parfaits pour la vente. Chaque année, un certain nombre d’arbres vont être coupés.
Un sapin sorti de terre il y a quelques années a été marqué sur son tronc. Ne sachant pourquoi, un plus ancien lui explique qu’il possède toutes les qualités pour devenir un sapin de Noël.
— Un sapin de Noël? Qu’est-ce que c’est?
— Eh bien, tu sais les humains ont de drôles de coutumes. Chaque année, après les premières neiges, ils viennent couper plusieurs d’entre nous. Ils choisissent les plus parfaits comme toi.
— Qu’est-ce que j’ai de parfait? Toi, tu es plus grand que moi!
— C’est vrai, sauf que mes branches ne sont pas aussi belles que les tiennes. En un sens, tu es chanceux, car tu vas être admiré pendant un temps.
— Tu trouves que c’est de la chance. Je vais être coupé et emmené loin de vous dans un endroit que je ne connais pas. Et puis que vont-ils faire de moi?
— Tu vas être installé dans une maison, à la meilleure place et tu vas être décoré. Pendant plusieurs jours, tu vas être le roi. D’autres personnes vont venir t’admirer, tu vas être pris en photo. Les humains appellent cette période le temps des Fêtes et tu deviens un sapin de Noël. Dans les maisons où il y a des enfants, tu es choyé, car ils t’attendent depuis longtemps et tu leur apportes beaucoup de joie. C’est à ton pied que sont déposés les cadeaux pour les habitants de la maison.

— Les cadeaux! Qu’est-ce que c’est?
— Durant le temps des Fêtes, les humains reçoivent des présents. Il y en a qui disent que c’est un gros bonhomme qu’ils appellent le Père Noël qui fait la tournée et dépose les cadeaux sous les sapins. Au petit matin, tout le monde est assis au pied du sapin et chacun déballe ses cadeaux. Tu sais pour certains c’est un privilège d’être choisi. Tu vas vivre de beaux moments et tu vas apporter de la magie dans la vie des enfants. Tu le verras dans leurs yeux. Je t’envie presque.
C’est après ces dernières paroles que le jeune sapin se fait déraciner. Il ne comprend pas tout de suite, mais son aîné lui explique que sa vie va continuer, car après cette période des Fêtes, il serait planté dans un jardin où il pourra grandir et continuer à émerveiller les enfants année après année.

Notre sapin a passé son premier Noël dans une maison pleine d’enfants qui ont pris soin de le décorer avec tout ce qu’ils avaient de plus beau.
Il fut admiré par tous et les enfants ont pris soin de lui jusqu’à ce qu’il soit replanté en pleine terre en avant de la maison. Il était temps, car il commençait à avoir chaud à côté du foyer et quelques-unes de ses aiguilles sont tombées.
Depuis, chaque année ce sapin grossit et grandit et chaque temps des Fêtes, il devient l’attraction du quartier par ses belles décorations accrochées à ses branches parfaites et équilibrées.



Je vous souhaite de très belles fêtes. Je vous souhaite de passer de bons moments avec les gens que vous aimez et n’oubliez pas de leur dire, même si vous êtes loin.

Je vais prendre quelques semaines de pause dans ce blogue et vous reviendrai en début janvier


Bonne année 2015 à toutes et à tous. Bonheur, santé et accomplissement dans tous vos rêves.  

dimanche 7 décembre 2014

La sentinelle d’ABIGUIGUI.


Je suis active et je m’allume dès la nuit tombée. Je suis la sentinelle d’ABIGUIGUI. Je trône fièrement presque en haut de l’étai. Pour ceux qui ne connaissent pas, l’étai est le hauban tendu entre la tête d’un mât et l’avant du bateau, et moi, la sentinelle, je suis la lumière annonçant que le bateau se trouve à l’ancre. Je suis un peu comme un phare. C’est ma façon d’avertir les autres bateaux qu’un navire est ancré.

Là où je me trouve, j’illumine les alentours. Au loin, certains sont intrigués par mes rayons et avancent au ralenti jusqu’à apercevoir la coque de mon bateau. Inévitablement, presque chaque nuit un goéland se pose en haut du mât. Veut-il être plus haut que moi, me dominer? Je pense que oui, car aussitôt que je m’allume, je le vois tournoyer autour de moi et se poser. La première fois que je l’ai aperçu, il s’est approché en se laissant porter par les courants d’air montants ou descendants. Puis il s’est posé sur le pont faisant mine de ne pas me voir. Je sentais son impatience et sa curiosité. Enfin, il demanda :
- Que fais-tu allumé la nuit? Ne dos-tu jamais?
- Grand dieu, non, je ne dois pas dormir. C’est la nuit que je travaille. Je suis en charge de protéger mon bateau. Et toi, tu ne dors pas non plus?
- Oh, moi j’aime voler la nuit. Les paysages sont très différents et c’est beaucoup plus calme.
- Tu as bien raison. Bon, laisse-moi travailler, ne me distrais pas.
- Qu’as-tu bien à faire d’autre que de rester allumée? Tout un travail!
- Peut-être, mais je dois le faire avec sérieux. Il en est de la survie de mon navire. Si je dépensais toute mon énergie à parler avec tous ceux qui tournent autour, je finirais par m’éteindre et risquer qu’on se fasse éperonner.
- Oh là! Ne te fâche pas, je te laisse.

Et il s’envola. C’est à partir du lendemain qu’il revint chaque nuit, qu’il se posa en haut du mât sans un mot revenant inlassablement nuit après nuit. J’avoue sincèrement que j’aime assez cela. Même si nous ne parlons pas, je ne me sens pas complètement seule.

Il arrive aussi parfois qu’un autre bateau s’ancre à côté et nous voilà deux sentinelles à veiller. S’il s’agit d’un voilier comme le mien, nous nous respectons. Par contre, il est arrivé qu’un gros bateau s’installe pour la nuit à côté de moi et voilà sa sentinelle qui se met à se vanter de tous les équipements de son « cruiser », de ce qu’ils sont capables de faire, de la vitesse folle qu’ils atteignent quelques fois. J’en ai honte pour ma profession. Ce n’est rien qu’une lumière accrochée à la proue. Moi je la laisse faire et parler et se pavaner, elle dépense son énergie inutilement et moi je ne l’écoute pas. Je prends soin de mon voilier et c’est tout ce qui m’importe.

Dès que le soleil se lève, aussitôt éteinte, je suis décrochée, laissant la place au foc, la petite voile en avant. Je me repose pour la journée en attendant de découvrir d’autres endroits à éclairer et aussi dans l’espoir de voir arriver mon ami le goéland. J’aime ce travail de sentinelle, j’en suis fière, c’est le plus beau métier du monde marin.

Bonne semaine à toutes et à tous.