La tête dans les vagues

Assise à ma table, face à la mer, où le vent souffle les embruns suivant le courant, je trouve l'inspiration qui me permet, au fil des mots, de vous partager mes passions.

dimanche 2 février 2014

Les Grilles du Comte Talbot… (suite 2...)

Cette semaine, voici la troisième partie du concours de mots croisés où Robert a été accepté après des éliminatoires à travers le monde. La scène est en place, les participants sont désormais des concurrents. Nous voici dans le vif du sujet, c’est le début des hostilités. Je veux prévenir les personnes très sensibles sur certains passages du texte. Mais en même temps, c’est très accrocheur. La preuve, comme je vous l’ai déjà écrit, Georges a failli couler lorsqu’il lisait cette histoire alors que son voilier prenait l’eau….


Chapitre 3

Jour 1 – 9 h 30
Après une nuit quelque peu agitée et un déjeuner silencieux, les dix concurrents sont escortés dans une salle sans fenêtre aux murs en boiserie sculptée noire, le sol recouvert de dalles grises et possédant deux portes diamétralement opposées. De chaque côté des portes des chandeliers sur pied. Dix tables, avec chacune un ordinateur déjà allumé, forment un cercle évasé de façon à ce que chaque candidat voie les neuf autres, mais sans apercevoir l’écran d’aucun autre ordinateur. Le nom de chacun est marqué sur le dossier de la chaise.

— Bonjour mes amis, annoncèrent les haut-parleurs du plafond. J’espère que vous avez bien dormi. Je vais répondre à la question que chacun de vous se pose. Comme je vous l’ai dit hier, vous n’avez droit à aucune erreur. Malheureusement, si cela vous arrivait, vous en subiriez les conséquences que vous découvrirez le moment venu. Il en va de même pour tout dépassement de temps. Vous vous êtes engagés dans cette compétition et vous ne pourrez plus faire marche arrière. Soit vous gagnez, soit vous mourrez.

Un lourd silence règne dans la salle. Ils sont tous assis en face de leurs ordinateurs qui s’animent en même temps. Leur nom s’affiche puis aussitôt des définitions et une grille parsemée de quelques cases noires emplissent l’écran. La grille comporte trente lignes et vingt colonnes.

— Mesdames et Messieurs, voici votre première épreuve. Afin de vous mettre en confiance, je n’ai pas voulu trop corser le jeu. À mon top de départ, vous aurez 1 h 30 pour remplir toutes les cases. Rappelez-vous, aucune erreur. Alors, réfléchissez bien et ne vous précipitez pas trop vite. D’après ce que j’ai pu voir aux éliminatoires, vous n’aurez aucune difficulté pour réussir un sans-faute. Bonne chance encore à vous tous. Attention… top départ.

Au même instant, le curseur s’active sur l’écran. Selon ses habitudes, Robert lit toutes les définitions et s’imprègne de la grille. Il est confiant de s’en sortir. Alors, il se concentre afin de taper les bonnes lettres au bon endroit. Il est absorbé par son écran. Sa grille se remplit petit à petit. Quarante-cinq minutes sont passées. Dans la salle, on n’entend que le cliquetis des touches enfoncées.

Soudain, un cri, ressemblant plus à un hurlement, déconcentre tous les participants. Julie a les yeux horrifiés.
— Je me suis trompée de tou…

Elle n’a pas le temps de terminer sa phrase. Sa chaise recule et une ceinture l’entoure, l’empêchant ainsi de se lever. Julie se met à tressauter de tout son corps. Sa chaise s’est transformée en chaise électrique. Elle pousse des cris déchirants. Une odeur de roussi emplit la pièce. Son visage est méconnaissable, transformé par la terreur qu’elle vit. Les neuf autres n’ont pas détourné les yeux de l’horreur qui s’est déroulée devant eux.

Puis c’est le silence total. Un silence de mort qui paralyse encore plus les concurrents. 

— Mesdames et Messieurs, ne vous laissez pas déconcentrer par cet évènement autrement vous serez la prochaine personne à subir un autre supplice. Reprenez votre jeu et oubliez ces dernières minutes.

Cela prit quelques secondes avant que tous reportent leur regard sur l’écran leur faisant face et se remettent au travail. La chaise de Julie glisse jusqu’au mur sans bruit. Son corps est avachi, les bras ballants, la tête sur le côté. Ses yeux, encore ouverts, montrent la terreur de ses derniers instants. Aucun autre incident ne se produit et tous ont complété leur grille quinze minutes avant la fin du temps prévu.

— Mesdames et Messieurs, mes félicitations. Vous avez réussi avec succès. Un excellent dîner vous attend, avant la prochaine épreuve qui débutera à 14 h 30 précise. Alors, revenez quinze minutes avant. Ne vous laissez pas démoraliser. Visez la récompense ultime. Bon appétit à tous.

Après un repas copieux, Robert rejoint sa chambre pour enlever la pression et se concentrer. Aucun échange, aucune parole n’a été prononcée depuis le déjeuner.

14 h 30
Les neuf concurrents sont à leur place. Le départ est lancé et une nouvelle grille apparaît à l’écran. Le niveau de difficulté est un peu plus élevé, le temps imparti est le même. On peut lire sur tous les visages l’épouvante de ce qui pourrait arriver d’ici la prochaine heure et demie.

Robert se crée une bulle virtuelle et ne regarde que son écran. Il se coupe de tout bruit extérieur. Il est à l’intérieur de son esprit. Après vingt minutes, un cri d’effroi fait sursauter les concurrents. Peter Heller essaie de se retenir à sa table alors que sa chaise glisse de quelques mètres. Comme pour Julie, une ceinture le maintient à sa place. Toutes les têtes, sauf Robert, se tournent vers lui. Le plafond s’ouvre et un filin en acier descend. Au bout du filin, une grosse boucle s’approche de la tête de Peter. Il tente de se débattre, de remuer afin d’éviter cette boucle fatale, mais ses mouvements sont trop réduits. Finalement, sa tête est prise au piège. Le nœud se resserre. Il a beau hurler, mais en vain. Il est libéré de sa chaise et le filin remonte emmenant Peter qui s’agite jusqu’à ce que la mort laisse son corps immobile. Il reste ainsi pendu jusqu’à la fin de l’épreuve. Tout ça a duré moins de deux minutes. Les autres se remettent à leur clavier. Robert ne s’est pratiquement rendu compte de rien.

Le temps imparti achève. Plusieurs ont terminé depuis quelques minutes, d’autres placent leurs dernières lettres quelques secondes avant le son de la cloche. Un seul est encore en train de taper sur son clavier, mais c’est trop tard. Un message apparaît sur son écran. « Trop tard, vous ne méritez pas d’aller plus loin »

Martin Elbaz hurle.
— Attendez, je connais le mot, je n’ai qu’à le taper.
Mais la ceinture l’a déjà emprisonné sur sa chaise qui recule.
Cette fois-ci, c’est le sol qui bouge. Quatre parois vitrées entourent Martin formant ainsi une boîte hermétique. De l’eau emplit la cage immergeant, à une vitesse impressionnante, le pauvre Martin qui, dans sa panique, ne peut retenir son air et succombe presque aussitôt.

Personne n’a bougé de sa chaise regardant cet autre crime se dérouler devant eux. Lorsque tout fut fini, la porte s’ouvrit libérant les sept derniers concurrents. 

* * *

Ouff!! J’espère que malgré tout vous avez aimé et que vous serez de nouveau présents la semaine prochaine pour la suite de l’aventure de Robert...


Bonne semaine à toutes et à tous.

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